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1 Éléments d'Anthropologie du Droit
Avant-propos : Philippe LABURTHE-TOLRA Doyen honoraire à la Sorbonne
Préface :
Norbert ROULAND Membre de l'Institut Universitaire de France

présentation avant-propos préface introduction plan
index analytique références table illustrations
1- Le souverain juge
2- “Pourquoi le sang de la circoncision...”
3- Dessin du dessein
4- “Authentique ! sans papier !”
5- L“Âme du Mil”
6- “Il faut se battre pour la constitution...”
7- Rire et démocratie
8- Sur l’innovation
9- La “culture des analgésiques” et l’individualisme
10- Du “mariage arrangé” à l’“amour-passion”
11- Du mythe au roman, de la Patrie à la Filisterie
12- La chimie du rire
13- Quelques données sur la prohibition de l’inceste
14- Morale et handicap
15- Le juge, de quel droit ?
16- Droit au sol et mythes d'autochtonie
17- Habiter, cohabiter : sur l’exemplarité
18- Le territoire de la langue : les deux natures



présentation

III - 8.8 Renoncer à la vérité

À supposer que la science et la magie - bien qu’évidemment contraires - poursuivent les mêmes fins et notamment celle de transformer le monde, à quoi tient donc le succès de la science (et de la technique qui en procède) ? Au fait que l’homme y renonce à la vérité. À sa vérité propre, spécifique, celle qui le définit comme un être d’émotion (sexué, généalogique, religieux, territorial) : à son humanité, pour se considérer comme une chose parmi les choses du monde. Cette mutation dans l’histoire du savoir prépare la réunification de l’espèce, éclatée dans ses langues, ses terroirs, ses écosystèmes, ses phénotypes et ses idéologies. La techno-science permet de résoudre - supérieurement - certains desseins de la magie, mais elle demande, à l’opposé de celle-ci, un esprit formé à l’ascèse de l’objectivité, fermé à la métaphore qui fonde son action, sourd à la polysémie qui procède du bruit des langues naturelles qui disent, elles, à raison de cette communication entre les réseaux significatifs, la participation de l’homme au monde. La réalité construite par la science n’a de nom dans aucune langue - et c’est pourquoi elle peut être partagée par tous les hommes - elle n’est dicible que dans “le silence articulé de l’algorithme” (Kojève). Je me hausse à cette conscience sans conscience dès lors que je me refuse à être tel homme, de telle tribu, de tel intérêt. Au lieu de vérifier l’adage : cujus regio, ejus religio, selon lequel la production spirituelle est une spécialité régionale (tel terroir, tel roi, tel cru), je me fais cet idéal de l’homme que le stoïcien Chrysippe définissait comme le sujet d’une société universelle, vivant de communs, coinonicôn, ou universaux.

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